Reconnaissance de la possibilité pour les apatrides d’origine palestinienne enregistrés auprès de l’UNRWA de bénéficier du statut de réfugié en cas de cessation de l’assistance ou de la protection de l’organisme
CJUE, 13 juin 2024, Zamestnik-predsedatel na Darzhavna agentsia za bezhantsite (Statut de réfugié – apatride d’origine palestinienne) Aff. C-563/22
Le 13 juin dernier, la Cour de justice de l’Union européenne (Ci-après « CJUE ») a précisé la nécessité d’attribuer le statut de réfugié aux apatrides d’origine palestinienne enregistrés auprès de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Ci-après « UNRWA »), dans un arrêt tenant compte de la « dégradation sans précédent » de la capacité de l’UNRWA à remplir effectivement sa mission au sein de la bande de Gaza, à la suite des évènements du 7 octobre 2023.
En l’espèce, une mère et sa fille mineure apatrides d’origine palestinienne quittent la bande de Gaza en juillet 2018 pour atteindre illégalement le territoire bulgare après une traversée de l’Égypte, la Turquie et la Grèce.
Alors que leur demande initiale de protection internationale est définitivement rejetée par les autorités bulgares au motif qu’elles n’avaient pas su démontrer une crainte de persécution, elles introduisent une seconde demande, motivée par la cessation de fait de la protection de l’UNRWA à leur égard en raison du contexte géopolitique. Cette dernière demande est également rejetée, les autorités ayant estimé que les intéressées avaient volontairement renoncé à l’assistance de l’UNRWA en quittant sa zone d’opérations.
Par une question préjudicielle, la juridiction bulgare demande notamment à la CJUE l’interprétation de la directive 2011/95/UE dite « qualification ». En effet, le juge bulgare note que cette dernière exclut par principe les personnes enregistrées auprès de l’UNRWA du statut de réfugié prévu par le droit dérivé de l’Union européenne. Cependant, la directive prévoit que si la protection ou l’assistance de l’UNRWA cesse « pour quelque raison que ce soit », les personnes préalablement enregistrées devraient bénéficier de plein droit du statut de réfugié.
La Cour est ainsi appelée à préciser la notion de « cessation d’assistance ou de protection » par l’UNRWA, ainsi que les conséquences à en tirer.
Sur la notion de cessation, la Cour considère que l’assistance ou la protection de l’UNRWA cesse à l’égard de demandeurs lorsque cet organisme n’a plus la faculté d’assurer aux apatrides d’origine palestinienne, séjournant dans le secteur de la zone d’opérations de cet organisme, des conditions de vie « dignes » ou des « conditions minimales de sécurité », et ce, pour quelque raison que ce soit.
S’agissant des conséquences, la Cour affirme que si la juridiction bulgare conclut que la protection ou l’assistance de l’UNRWA dans ce secteur de sa zone d’opérations doit être définie comme ayant cessé à l’égard des deux requérantes, ces dernières devraient, de plein droit, se voir attribuer le statut de réfugié.
Cet arrêt doit se lire à la lumière des événements du 7 octobre 2023, tels que soulignés par l’Avocat Général M. Nicholas EMILIOU, puisque la CJUE relève que, depuis, tant les conditions de vie dans la bande de Gaza que la capacité de l’UNRWA à remplir sa mission se sont dégradées « sans précédent ».
M2 DEDH