

Le Conseil d’État juge que le droit de communication ne prend pas en compte les pièces d’une procédure disciplinaire devant le Conseil de l’Ordre en raison de leur rattachement à la fonction juridictionnelle.
Conseil d’État, 19 novembre 2024, n°474435
Le 19 novembre 2024 le Conseil d’État a rendu un arrêt concernant l’accès des avocats aux documents administratifs.
Il s’agissait d’une procédure disciplinaire ouverte devant le Conseil de l’Ordre des avocats en octobre 2019, Mme C.E ayant demandé le 5 octobre 2020 au bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de Paris la communication des éléments administratifs et disciplinaires à caractères professionnel la concernant dans cette procédure. Mme C.E se pourvoit finalement en cassation contre le jugement du 23 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d’annulation pour excès de pouvoir de la décision de rejet du bâtonnier concernant la communication de ces informations.
Afin d’apprécier le bien-fondé du jugement attaqué, le Conseil d’֤État commence par rappeler le cadre du champ du droit à la communication des documents administratifs. En effet pour que les administrations soient tenues de communiquer les documents qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, il faut qu’il s’agisse de documents administratifs, c’est-à-dire de documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission. A l’inverse, les documents qui se rattachent à la fonction juridictionnelle n’ayant pas la qualité de documents administratifs, les administrés n’ont pas de droit à ce qu’ils leur soient communiqués.
Le Conseil d’État va alors se pencher sur la nature des missions du Conseil de l’ordre, notamment ses missions disciplinaires. Le Conseil d’Etat affirme que cette instance disciplinaire doit être regardée comme un organe juridictionnel, et que par conséquent, les documents qui conduisent à la saisine de l'instance disciplinaire et ceux qui sont établis au cours de la procédure disciplinaire proprement dite se rattachent à la fonction juridictionnelle et n'ont, dès lors, pas le caractère de documents administratifs.
Tel était le cas pour les documents demandés par la requérante : des pièces versées par un cabinet ayant donné lieu à l'ouverture de l'enquête déontologique par le bâtonnier ainsi que des procès-verbaux de ses propres auditions devant le conseil de l'ordre après l'ouverture de la procédure et enfin, des documents retraçant les allégations de la personne en procédure disciplinaire. Pour le Conseil d’État, ces documents sont des pièces de la procédure disciplinaire ouverte devant le Conseil de l'Ordre et se rattachent, par suite, à sa fonction juridictionnelle. Le droit de communication ne peut donc pas être appliqué. Ainsi, le Conseil d’État rejette le pourvoi.
Joseph VNUK
M2 DEDH